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Gabon D'abord
1 mars 2007

L'iboga, une racine gabonaise, au coeur d'une enquête pour homicide involontaire

source: le monde

iboga  27 ans, Jerry, toxicomane, voulait "devenir un homme normal", a-t-il écrit de sa main sur le questionnaire d'inscription à un séminaire de sevrage très particulier, rempli le 16 juin 2006. Avant la signature, il a sûrement lu le petit paragraphe de bas de page. "J'ai bien noté qu'il ne s'agit en aucun cas d'un traitement médical, mais d'une recherche spirituelle réalisée dans le cadre du culte traditionnel bwiti. (...) Je connais les risques de prise d'une plante telle que l'iboga", est-il précisé. Un mois plus tard, le 18 juillet 2006, les gendarmes ont découvert son corps dans le château de Liviers à La Voulte-sur-Rhône (Ardèche).


Le culte bwiti est une tradition ancestrale gabonaise, héritée des Pygmées, permettant d'accéder à l'âge adulte. Il mélange des incantations, de la musique et des danses très réglementées, sous l'autorité d'un nganga, maître de cérémonie et guérisseur. L'ingrédient indispensable à ce rite est l'iboga, une plante classée patrimoine national au Gabon, dont les effets sont redoutables. Consommée en poudre - le goût est répugnant, paraît-il, mais on peut la dissoudre dans l'eau -, elle permet, selon ses adeptes, de faire une introspection vertigineuse, de dénouer des noeuds intérieurs, de remonter le cours de sa vie jusqu'à l'enfance sous forme de visions. Elle aurait aussi des vertus de sevrage. Le problème, c'est que Jerry consommait beaucoup de drogues. Leur effet, ajouté à celui de l'alcool, a été décuplé par l'iboga et a, semble-t-il, entraîné sa mort.

Le parquet de Privas a ouvert une information judiciaire pour "homicide involontaire". Le couple qui organise les séminaires a été mis en examen, de même que deux assistants. Seule une personne a été incarcérée : Mallendi. C'est le nom de nganga de Herman Nzamba Boussougou, 26 ans. Détenu à la maison d'arrêt de Valence depuis le 27 janvier, ce "tradipraticien" agréé au Gabon assure qu'il n'était pas présent sur le territoire au moment du séminaire fatal.

"DÉTENTION ARBITRAIRE"

Le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande de remise en liberté, craignant qu'il ne quitte le territoire alors qu'il "reconnaît l'administration de cette plante à plus de 1 000 personnes, qui ont participé à des séminaires" et versé 200 euros. "On a pourtant apporté la preuve de son absence, avec la facture du billet d'avion et le coupon d'embarquement au retour", clame la compagne de Mallendi, Bertine Djomo, attachée commerciale, âgée de 28 ans.

Chamane élevé au milieu des plantes au Gabon, Mallendi vit en France depuis 2001. Son unique source de revenus - entre 3 000 et 4 000 euros mensuels, en moyenne - provient des cérémonies et de la distribution de l'iboga, au cours des trois nuits rituelles (la mort, la renaissance et la célébration).

Assis sur des nattes au milieu de plantes, de reliques, de graines et de plumes de perroquet, les adeptes de l'iboga consomment la racine sur un air d'arc-en-bouche - instrument sacré millénaire - et de harpe à huit cordes sculptée en forme de femme. "Pendant leur voyage, certains pleurent, crient ou ont mal au plexus, explique Bertine Djomo. Moi, je rigolais tout le temps. Quand une personne délire, le nganga peut lui donner un antidote. C'est lui qui maîtrise les doses."

Les enquêteurs et le juge estiment que l'iboga est à l'origine du décès de Jerry et considèrent Mallendi comme le pourvoyeur de la racine... qui n'est pourtant pas interdite en France ! "Cette détention est totalement arbitraire, assure son avocat, Me Eric Plouvier, parce que l'iboga n'est pas classée comme une drogue et que Mallendi était absent au moment des faits. On est en présence d'un refus radical et aveugle de cette culture africaine, avec des juges qui se substituent au législateur."

Dans le dossier figurent des attestations de consommateurs d'iboga, parmi lesquels un ingénieur et de hauts fonctionnaires, se portant garant de la probité de Mallendi. M. et Mme S., organisateurs des séminaires, ont été mis en examen pour les mêmes chefs - "homicide involontaire" et "mise en danger de la vie d'autrui" - mais laissés en liberté. Jeanne S. a pourtant reconnu qu'elle avait donné l'iboga à Jerry, alors qu'il avait bu de l'alcool et pris de la méthadone. "Durant toute la soirée et la nuit je lui ai donné trois cuillères d'iboga alors que dans le même temps les autres en avaient, eux, huit", a-t-elle expliqué aux gendarmes.

A ses yeux aussi, l'iboga n'est pas dangereuse en soi. "On peut l'introduire en France comme des pommes de terre ! précise Mme S., jointe par téléphone. Cette racine n'a jamais tué personne, sauf si elle est mélangée avec d'autres produits. On peut même en manger une ou deux assiettes."

Dans son rapport 2006 sur les dérives sectaires, la Miviludes s'est émue du développement de ces séminaires dédiés à l'iboga. La vente et la consommation de sa racine sont interdites aux Etats-Unis, en Suisse et en Belgique. Selon le ministère de la santé, elle constitue, à forte dose, un hallucinogène. "Le classement de l'iboga sur la liste des stupéfiants pourrait être proposé", affirme la Miviludes. Pendant ce temps, sur Internet, la culture chamanique du Gabon n'a jamais été aussi populaire.

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Commentaires
K
http://www.eboga.fr<br /> <br /> Bien cordialement.
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